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Journaliste en vadrouille sur les routes de France et de Navarre

Voilà Marseille

Albert Londres écrit en 1926 Marseille, porte du Sud
Et chez nous ? Chez nous on ne veut connaître la mer que pour y prendre des bains. Nos compatriotes calmés ne cherchent pas des bateaux, sur un rivage mais des casinos. L’hiver, on part pour la Côte d’Azur. Mais qui s’arrête à Marseille ? Le plus beau port de France, cela n’intéresse personne. Parlez-nous de suivre une partie de tennis sur un court de Cannes !
L’ignorance des Français sur les choses de la mer est considérable. Quand par hasard un romancier écrit sur le sujet, il doit expliquer tous les mots du vocabulaire marin. Le dernier des boys de Londres en sait davantage que nos jeunes gens diplômés.

Il est des personnes qui, depuis trente ans, ont dépassé l’âge de raison et qui me demandent encore si les bateaux marchent la nuit. 

J’exagère ? Si peu ! Qu’un pays soit à dix jours de nos côtes, aussitôt plus personne ne sait si le pays est en Asie, en Afrique ou en Amérique. Donnons l’ordre à cent étudiants de partir sans délai pour les Grandes Comores, et nous en verrons cinquante aller prendre le train à la gare Montparnasse ! 

[…] 

Allez à Marseille. Marseille vous répondra. 

Cette ville est une leçon. L’indifférence coupable des contemporains ne la désarme pas. Attentive, elle écoute la voix du vaste monde et, forte de son expérience, elle engage, en notre nom, la conversation avec la terre entière.

Un oriflamme claquant au vent sur l’infini de l’horizon, voilà Marseille.

La mondialisation du café - le port de Marseille en 1926 par Albert Londres

© tejasjain
© tejasjain
Albert Londres écrit en 1926 Marseille, porte du Sud
Ce café vient de Moka. Du moins on le dit. Mais je vais vous dire ce que l’on dit. On dit que si tout le café qui vient de Moka poussait à Moka, cela se saurait. On sait tout le contraire. Moka est en Arabie, sur la mer Rouge. Le café qui vient de Moka pousse au Brésil ! Suivez-moi bien. Plutôt, suivez ce café. Il pousse au Brésil. On l’embarque sur l’Atlantique Sud. L’Atlantique Nord le berce un moment. Il passe par Gibraltar et, doucement, il s’amène sur la Méditerranée. Marseille ! On le débarque. On va le boire ? Pas si vite. Rentrez vos tasses dans le buffet. On le rembarque. Le voilà qui repart sur la Méditerranée, dans l’autre sens. Il longe les côtes de la Corse, il fend le détroit de Messine. Il se prélasse à l’abri de la Crète. A Port-Saïd, il retrouve sa chaleur natale. On le débarque. Qu’il soit sans crainte : ce n’est pas encore pour le brûler. On le rembarque. Sur un bateau khédivial, il va maintenant descendre jusqu’au bas de la mer Rouge. Lui est toujours blanc. Enfin, Moka ! 

Après un tel voyage, il a mérité de changer de linge. On le change de sac. Comme il se sent légèrement fatigué, on lui ajoute des grains de moka pour le remonter. Puis on le rembarque. Il est baptisé. Tête haute, il peut revenir à Marseille. Il est revenu. Le voici sur le quai.

En Suède, une administration culturelle tardive

Extrait de mon travail de recherche en cours… Ma dernière lubie : associer géographie économique, radio et Suède. Tout un programme ! Donc une radio suédoise : Sveriges Radio, de son petit nom SR, c’est le radiodiffuseur public suédois. Ce qui m’intéresse : sa stratégie d’internationalisation…
Le sens donné à l’expression de diversité culturelle dépend du contexte national. En Suède, le domaine de la culture est longtemps demeuré peu organisé. Le champ culturel est marqué d’une dichotomie entre une culture populaire, la plus souvent tolérée, et une culture officielle, celle du roi et de la cour. L’usage de la langue française à la cour en témoigne. Le Parti social-démocrate, qui domina la vie politique suédoise au XXe siècle, s’empare de la question tardivement et ne peut gommer ce clivage entre cultures populaire et élitiste. Il faut cependant noter que les premières mesures du gouvernement social-démocrate en faveur de la culture préconisent l’usage de la radio nationale, Sveriges Radio (SR), comme outil de promotion de l’opéra et de la musique symphonique. 

Au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, la culture, toujours dispersée en portefeuilles incertains, préoccupe davantage la classe politique. Le 22 mai 1959, le ministre des affaires ecclésiastiques s’exprime ainsi : « La culture ne peut être laissée aux forces du marché mais doit être défendue par des mesures gouvernementales »*. Une période de réflexions est alors amorcée ; elle aboutira à l’élaboration de la feuille de route « Nouvelle politique culturelle ». En 1974 sont ainsi rassemblés les différents portefeuilles ministériels en un domaine culturel, département du ministère des affaires ecclésiastiques. Ce document est révisé en 1995, période peu propice tandis que le pays subit une grave crise économique. Le budget alloué à la culture augmente peu mais celui-ci est redistribué. En particulier, le gouvernement souhaite accompagner le fort investissement des foyers dans les médias de masse. Enfin, un ministère de la culture est inauguré. Aujourd'hui, les affaires culturelles correspondent à 0,8 % du budget du gouvernement avec 727,6 milliards d’euros. L’investissement en faveur de la culture est élevé pour l’Etat (45%) et les municipalités (41%), légèrement inférieur pour les régions. En 2009, 7% des dépenses de l’Etat étaient consacrées aux médias, soit 78,4 milliards d’euros. L’investissement culturel public est estimé à 39% contre 61% pour le privé.

Source :
Ambassade de France à Stockholm, (13 octobre 2010), « Budget 2011 présenté au parlement suédois », dans Revue de la presse suédoise du 13 octobre, disponible à l’adresse http://www.ambafrance-se.org/spip.php?article3970
Regeringskansliet [Gouvernement suédois], (15 octobre 2010), “Budget Bill for 2011 – Culture”, dans Culture, disponible à l’adresse http://www.sweden.gov.se/sb/d/13671
Kulturrådet [Conseil de la culture], (juillet 2008), Kulturens finansiering 2007 [Financement de la culture 2007], disponible à l’adresse http://www.kulturradet.se/Documents/publikationer/2008/kulturens%20finansiering/kulturens_finansiering_2007.pdf
Kulturrådet [Conseil de la culture], (juillet 2010), Kulturens finansiering 2008–2009 [Financement de la culture 2008-2009], disponible à l’adresse http://www.kulturradet.se/Documents/publikationer/2010/kulturens_finansiering_2008-2009.pdf

Bibliographie sélective :
* LARSSON Tor, SVENSON Per, (2001), “Cultural Policy in Sweden”, p 79-96, dans The Journal of Arts Management, Law, and Society, Vol 31 n° 1