Les articles

300 mots et une sélection de références autour d'un sujet géographique

Les brouillons

Idées griffonnées dans la marge des feuilles de cours

Les notes

Quelques mots des conférences, colloques, films, rencontres, etc.

Les photographies

Dans la besace du géographe, des photographies de quelques terrains parcourus

Les instantanés

Journaliste en vadrouille sur les routes de France et de Navarre

Café géopolitique - "WikiLeaks" bouleverse-t-il la diplomatie mondiale ?

Continuons la série des révisions avec ce café géopolitique consacré à WikiLeaks. Un café géopolitique où l’on ne peut s’asseoir : WikiLeaks déchaîne les passions. Le sujet est néanmoins difficile. Les invités expriment leur opinion plus qu’ils ne peuvent avancer quelque argument. Plus d’1h30 consacré à un débat de surface, ce café géopolitique a permis de recenser nos fantaisies sur le sujet y compris dans les plus hautes sphères de l’IFG.
Ce que j’ai retenu : Au cours de ces deux heures, Rémy Ourdan, Jean-Christophe Rufin et François Nicoullaud ont tenté de ré-inscrire le débat avec des termes plus mesurés, plus pragmatiques. 1- La publication des câbles de la diplomatie Etats-unienne est issue d’un travail de journalisme et non du site web WikiLeaks et de son équipe. La source est certes plus spectaculaire par la quantité et par son intermédiaire mais la responsabilité des écrits (vérification) et de la protection des personnes citées revient aux rédactions des journaux. 2- Qu’est-ce que le secret ? Quelques perles ont surgi de ces mémos mais aucune analyse géopolitique ne s’est effondrée. L’intérêt réside dans ces portraits de dirigeants, d’hommes politiques. Le secret est nécessaire pour quelques mémos d’ordre opérationnel dans des situations très précises (prise d’otages). 3- WikiLeaks est une action citoyenne qui utilise les méthodes de transgression de son temps (Internet, cryptage) afin de répondre à un idéal, ici, la liberté d’informer. « WikiLeaks » bouleverse-t-il la diplomatie mondiale ? Clairement non !

Projection - débat autour des médias

Retour à la Maison Mère avec un invité de prestige, M Serge Halimi, directeur du Monde diplomatique pour un sujet qui lient médias et activisme. Le ton était pédant et donneur de leçons mais après tout, qui est-on pour juger du haut de ses petits 23 ans alors que ces messieurs nous ont offert d’éventuels arguments et exemples pour nos partiels. Soyons pragmatiques ! 
Ce que j’ai retenu : Le film José Bové et le cirque médiatique rappelle à l’assistance qu’à une certaine époque, curieusement pas si lointaine, José Bové était un personnage médiatique. C’était un élu des journalistes, choisi pour ses moustaches et son côté gaulois, ses réponses un peu bourrues. Mais voilà, ces mêmes journalistes ont un jour décidé de démonter son personnage. Dans ces circonstances, la Confédération paysanne ou l’alter-mondialisme ont-ils gagné d’une telle médiatisation ? au prix de quelles concessions ? Serge Halimi et Pierre Rimbert sont deux intervenants pessimistes lassés de la critique des médias sans toutefois parvenir à surpasser l’exercice. L’assistance n’a pas toujours approuvé mais a construit un riche débat. Je rendrais peut-être justice à deux intervenants : La première est apprentie journaliste et s’inquiétait des formats et formatages : « Alors remettez-en question les contraintes que l’on vous impose. », faisons la révolution petits bac + 5… ; le second apportait la question de référentiel commun au débat et c’était fichtrement pertinent mais M Halimi refuse de regarder le JT de 20h sur TF1… Déception toujours, le débat s’est conclu par cette charmante déclaration « Les articles du Monde diplomatique sont lus par quelques uns qui à leur tour les expliqueront avec des mots plus simples à d’autres. » pour laquelle je suis restée pantoise. Mais je terminerais par une autre citation qui m’a ravi et qui ne cesse de titiller ma réflexion « Le pouvoir des médias, c’est dérober des informations à l’espace public. » (M Pierre Rimbert).

Un film : Sound of Noise

film suédois d’Ola Simonsson et Johannes Stjärne Nilsson, sorti le 29 décembre 2010 par chez nous 

Keep The Beat by ~cattishfish
La ville et son brouhaha, ce murmure continuel de la circulation, les talons de ces dames, le camion de poubelle et la collecte du verre, le klaxon des heures de pointe, ton voisin et son zim-boum-boum ce matin dans le tramway. Aspirer au calme de la campagne… le bruit caractérise-t-il nos villes ? 

Et si ces bruits pouvaient produire des sons, les sons qui composent une œuvre musicale. Pour cette joyeuse bande de six percussionnistes, la ville est un vaste terrain de jeu d’une œuvre en quatre temps. Quand à l’inspecteur à leur trousse et son ouïe hypersensible, il déteste la musique. 

Sound of Noise est un film plein d’humour avec une petite touche de poésie. Un film suédois mais pas du maître Bergman, tu peux donc espérer comprendre quelques morceaux (non, je n'ai pas pu tenter Adieu Falkenberg). Le film fut tourné à Malmö, ville phare du projet transfrontière Öresund, entre la Suède et le Danemark. C’est un film pour toi qui aime écouter la pluie qui bat dehors et pour ceux qui connaissent le son des passages piétons en Suède.

NB : Avant ou après, il y a aussi le court métrage Music for One Apartment and Six Drummers, plutôt après tout compte fait.

La bibliographie et le(s) lieu(x) de publication

Rentrée du 5 janvier 2011 (à la fac, hein), 15 heures, M Derieux :
Tiens, tu sais, lorsque tu réalises ta charmante bibliographie à l’issue de chacun de tes devoirs, tu as parfois un souci avec la littérature anglo-saxonne : il y a deux lieux d’édition. A croire que l’on t’en veut vraiment ! Le plus souvent, tu lis New York et Londres (chez Routledge en particulier), à la rigueur New York et Toronto. Mais parfois c’est Northampton et Londres, chez Edward Elgar. Northampton… mais c’est où ça ? Dans le Massachussets, très cher.
  
Que faire face à un tel déchaînement des éléments contre toi à une demi-heure de rendre ton papier ? Tu prends le lieu d’édition aux Etats-Unis. Et il y a une logique, je t’explique : 

Il ne t’aura pas échappé qu’il existe des droits de propriété intellectuelle et des droits de propriété industrielle. Les Etats-Unis apprécient et protègent des droits de propriété industrielle, la propriété intellectuelle les passionnent moins. Ils ont ainsi tardé à ratifier la Convention de Berne, premier texte de droit international des médias. Les Etats-Unis ratifient en 1989 cette convention de 1886. Mais, il y a toujours un mais, la Convention de Berne prévoit dans son article 3 de protéger « en vertu de la présente Convention : » 
« b) les auteurs ne ressortissant pas à l’un des pays de l’Union, pour les œuvres qu’ils publient pour la première fois dans l’un de ces pays ou simultanément dans un pays étranger à l’Union et dans un pays de l’Union. » 

Fichtre, c’est bougrement intelligent. Les auteurs Etats-uniens ont donc pris pour habitude de publier, de manière un peu fictive, leurs ouvrages aux Etats-Unis et en Grande Bretagne ou aux Etats-Unis et au Canada. On se couchera tellement moins bête ce soir.

WikiLeaks : de la liberté d'expression à la responsabilité des médias

Révisons le droit des médias. WikiLeaks questionne la liberté d’expression, la protection des sources du journaliste, la responsabilité des médias et le recel de violation de secret : que de beaux sujets du droit européen, international et comparé.
 books
books
     Un fondateur, citoyen australien, des serveurs un peu partout, d’Amazon.com à la France, la Suisse, et surtout la Suède, une organisation à but lucratif avec une société islandaise… ou le casse-tête juridique pour arrêter ce flux d’information.

     Je vous conseille ainsi la lecture de l’A propos du site dans lequel l’article 19 de la DUDH (1948) est cité : « Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen que ce soit […] ». La DUDH, précédé de la Charte des Nations unies (1945), n’est qu’une déclaration et il faut donc s’intéresser au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (1966) et son article 19 §2 : « Toute personne a droit à la liberté d’expression ; ce droit comprend la liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce, sans considération de frontières, sous une forme orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen de son choix ». Dès le §3, des restrictions à ce droit sont introduites : « […] comporte des devoirs spéciaux et des responsabilités spéciales. Il peut en conséquence être soumis à certaines restrictions qui doivent toutefois être expressément fixées par la loi et qui sont nécessaires : 
a) au respect des droits ou de la réputation d’autrui ; 
b) à la sauvegarde de la sécurité nationale, de l’ordre public, de la santé ou de la moralité publiques. ». L’article 20 du même texte énumère d’autres restrictions. 

     Seconde échelle d’analyse, le Conseil de l’Europe, Wikileaks semble particulièrement apprécier son droit et surtout la jurisprudence de la CEDH. La Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (1950) inscrit la liberté d’expression dans son article 10 : « Toute personne a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontière » et les restrictions qui l’accompagne §2 « L’exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l’intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations confidentielles ou pour garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire. […] ». La protection des sources du journaliste consacrée par la CEDH est tirée de ce même article 10. 

     Par la suite, Wikileaks peut se réfugier derrière des droits nationaux. On se souvient de la réforme en cours relative à la protection des sources journalistiques en Islande, largement influencée par l’organisation. Et la Suède qui abrite des serveurs conséquents et le lien au Parti Pirate. 

     Le but du jeu est donc d’arrêter le flux d’information Wikileaks sous le chapitre, la responsabilité des médias

Quels textes juridiques peuvent-être mobilisés ? 

     Bien que Wikileaks dévoile de nombreux documents, l’organisation affectionne particulièrement les productions américaines, droit Etats-unien ? Seulement le préjudice subi est un peu partout. S’il est cantonné aux ambassades américaines, on pourrait à la rigueur faire valoir un droit extraterritorial. Mais les seules victimes des derniers mémos se retrouvent aussi parmi les informateurs, volontaires ou non, de ce personnel diplomatique Etats-unien. Ce qui implique du droit national de chacun de ces pays. Ou alors, on pourrait utiliser la loi du pays émetteur. Qui est le pays de présence physique des serveurs ou l’Islande, siège de la société Sunshine Press Productions ? On pourrait aussi imaginé mobiliser la loi du pays de résidence de la personne mise en cause, l’Australie de Julian Assange ? 

Dans quelles juridictions avancer sa requête ? 

     Admettons que vous ayez choisi vos textes de référence, la juridiction n’en découle pas. Habituellement, il est préférable d’introduire sa requête dans la juridiction du défendeur parce que la peine d’amende (pénal) ou la condamnation à dommages et intérêts (civil) sera plus facilement exécutable. Le juge peut mobiliser une ou des lois étrangères. On pourrait aussi introduire une requête sur le lieu de la faute ou celui (ou ceux) du dommage. 

     Ainsi, il est sacrément plus simple d’attaquer le fondateur Julian Assange pour agressions sexuelles : les termes sont moins équivoques et les droits nationaux plus harmonisés (à l’exception des statuts personnels du droit musulman mais je doute que Julian Assange y trouve refuge).

Glossaire :
CEDH = Cour Européenne des Droits de l'Homme qui siège à Strasbourg dans le cadre du Conseil de l'Europe, à ne pas confondre avec la Cour de Justice de l'Union Européenne
DUDH = Déclaration Universelle des Droits de l'Homme
NU = Nations Unies

Bibliographie sélective :
DERIEUX Emmanuel, (2006), Droit de la communication - Droit européen et international (recueil de textes), Victoires Editions : Paris
DERIEUX Emmanuel, GRANCHET Agnès, (2010), Droit des médias - Droit français, européen et international, LGDJ : Paris

A propos du droit suédois, du Parti Pirate et de Pirate Bay, suivre la chronique de SverigesRadio (de langue suédoise).